Cour d'appel de Douai, Sociale e salle 4, 25 juin 2021, n° 19/01397

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Douai, soc. e salle 4, 25 juin 2021, n° 19/01397
Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro(s) : 19/01397
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Calais, 2 juin 2019, N° 17/00205
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT DU

25 Juin 2021

1913/21

N° RG 19/01397 – N° Portalis DBVT-V-B7D-SNFQ

PL/AL

RO

Jugement du

Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de CALAIS

en date du

03 Juin 2019

(RG 17/00205 -section )

GROSSE :

aux avocats

le

25 Juin 2021

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

— Prud’Hommes-

APPELANTE :

E.U.R.L. EAMUS CORK SOLUTIONS

[…]

[…]

représentée par Me Z BOULANGER, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER

INTIMÉ :

M. Z A

[…]

[…]

représenté par Me Audrey SART, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER

DÉBATS : à l’audience publique du 07 Avril 2021

Tenue par L M

magistrat chargé d’instruire l’affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Annie LESIEUR

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

B C :CONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRESIDENT

D E

: PRESIDENT DE CHAMBRE

L M

: CONSEILLER

Le prononcé de l’arrêt a été prorogé du 28 Mai 2021 au 25 Juin 2021 pour plus ample délibéré

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 25 Juin 2021,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, signé par B C, Président et par Angelique AZZOLINI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 24 Mars 2021

EXPOSE DES FAITS

Z A a été employé en qualité d’agent de sécurité par contrat de travail à durée déterminée motivé par un surcroît d’activité du 21 octobre 2015 au 31 janvier 2016, par la société Ensemble construisons la Sécurité, puis du 1er février au 31 août 2016 par la société EAMUS CORK SOLUTIONS, et par contrat de travail à durée indéterminée à partir du 1er septembre 2016.

Il a été convoqué par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 1er décembre 2016 à un entretien le 13 décembre 2016 en vue de son licenciement. A l’issue de cet entretien, son licenciement pour faute grave lui a été notifié par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 19 décembre 2016.

Les motifs du licenciement tels qu’énoncés dans la lettre sont les suivants :

«Récemment, la Direction s’est vu remettre une série de copies de vidéos Snap-chat qui montrent plusieurs salariés de notre société qui ont des comportements intolérables.

Ces comportements ont eu lieu au courant du mois de Novembre 2016.

Sur ces vidéos, que nous vous avons présenté, on vous distingue nettement sur votre lieu de travail, en uniforme et pendant votre temps de travail, en train d’avoir les comportements suivants :

— En train de réaliser des selfies vidéos en compagnie de Océane BOUCHEQUET et O X ou vos visages sont transformés entre autres à l’aide d’oreilles et de nez d’animaux

— En train de feinter de dormir avec trois de vos collègues de travail dans des fauteuils, sur le chemin d’un camion qui se présente au contrôle dans le hangar (N O, Y Ludovicet une personne non-identifiée.)

— En train de de traverser à pied devant un camion se présentant au contrôle en feintant de ne pas le voir tout en faisant tourner un balai dans vos mains à la façon d’une majorette avant de vous stopper net ; de pivoter face au camion ; planter le balai au sol d’une main tout en levant l’autre en l’air de façon à lui demander de s’arrêter.

L’une de ses vidéos est par ailleurs réalisée par vos soins. On y voit vos collègues M. Y F et N O en train de danser dans le hangar de contrôle.

Lors de l’entretien du 13/12/2016 ; vous avez entièrement reconnu les faits susvisés, nous vous citons :'sur une partie de la vidéo, je fais semblant de dormir avec X, Y et un troisième que je ne reconnais pas. J’arrête un camion avec un balai, c’était pour mettre de la bonne humeur. Comme le travail est dur, c’était un moment de décompression'.

Vous avez précisé que cela ne se reproduirait plus.

Premièrement nous vous rappelons que vous n avez pas à utiliser votre téléphone portable personnel pendant votre temps de travail, lequel doit être dédié à la réalisation des missions qui décembre vous sont confiées.

De surcroit, vous n avez pas à filmer ou prendre de photographies du site et des personnes aqui y travaillent et encore moins pour les diffuser sur des réseaux sociaux, dont vous ne contrôlez pas, par ailleurs l étendu de sa diffusion.

Ces vidéos et vos affirmations démontrent que vous avez fait délibérément le choix d opter pour un comportement qui n a pas sa place au sein de notre entreprise et qui ne correspond en rien avec les qualités essentielles que l on est en droit d attendre d un agent de sécurité.

Alors que vos missions consistent à procéder au contrôle des passagers et de leur véhicule que nous confie l immigration britannique, vous accueillez ces derniers avec légèreté et un manque cruel de considération.

Nous peinons à croire que le fait de faire tournoyer un balais ou de feinter de dormir devant les passagers que vous vous apprêter à contrôler soit source de bonne humeur ou de décompression pour l équipe.

Bien au contraire ce comportement est source de conflit avec les passagers qui seraient en droit de se poser des questions sur le sérieux avec lequel vous vous apprêter à contrôler le leur…

En effet, il est indéniable que les passagers du tunnel sous la manche qui doivent se soumettre à nos contrôles avant l embarquement et qui ont constaté la légèreté et la provocation avec lesquelles vous exercer vos missions, ne peuvent que se faire, à tort, qu une opinion négative sur le sérieux de nos missions et des salariés qui composent notre société.

En plus de vos propres écarts de comportement, vous encouragez vos collègues à faire de même puisque nous vous distinguons sur d autres vidéos en train de rire des méfaits de vos collègues et vous prenez visiblement plaisir à immortaliser ces moments et de les diffuser via les réseaux sociaux, tout cela au détriment de notre image.

A ce titre nous précisons que, comme vous le savez, une majorité de chauffeur routier disposent de caméras embarquées. Aussi dans la mesure où vous vous êtes distingués devant ces derniers, parfois même à quelques centimètres de leur parebrise, il y a de fortes chances que vos exploits aient été enregistrés par différents clients de la société Eurotunnel.

En agissant de la sorte, de surcroît devant les clients de la Société Eurotunnel, vous avez gravement mis à mal l image de notre société et sans aucun doute celle de l Agent de Sécurité.

Votre comportement est de nature à nous porter préjudice auprès de la Société Eurotunnel qui pourrait décider de nous exclure de son site ce qui aurait un impact fortement négatif sur nos relations commerciales et déboucherait inévitablement sur la perte de ce marché et de leur emploi pour vos collègues de ce site.

Notre client Border Force, serait fort surpris de constater à quel point vous négligez les missions qu il nous confie.

Vous n êtes pourtant pas sans savoir que nous sommes actuellement en appel d offre pour tenter de renouveler notre partenariat avec Home Office.

Votre comportement nous porte d autant plus préjudice qu il est volontaire de votre part : il ne s agit pas d une erreur ou d une inattention mais bien d une volonté manifeste de transgresser outrageusement les règles de bonne conduite de l entreprise et de déontologie.

Nous vous rappelons que le Code de la sécurité intérieure prévoit les dispositions suivantes

Article R631-5

Dignité

( )

Article R631-7

Attitude professionnelle

( )

Article R631-27

Respect public

(…)

L’ensemble de ces dispositions qui s’imposent à l’ensemble des Agents de sécurité et donc à vous même font notamment partie intégrante du Code de déontologie ( ) des activités privées de sécurité dont vous avez accusé remise lors de votre embauche.

Il apparait nettement que les faits que nous vous reprochons sont avérés et relèvent d actes volontaires de votre part qui mettent en danger de nombreuses personnes et notre société.

Ce manque de respect à l égard de votre hiérarchie, de la profession d Agent de sécurité et de vos collègues est notamment illustré par vos différents écarts de comportements par lesquels vous mettez à mal l image de notre entreprise et de ses salariés ce qui remet en jeu les bonnes relations commerciales que nous nous efforçons d entretenir avec nos clients et nos partenaires.

Nous vous rappelons que nombreux emplois, ceux de vos collègues, dépendent de nos contrats commerciaux

L attitude dont vous faites preuve est incontestablement incompatible avec les focntions d Agent de sécurité que vous occupez. Un comportement exemplaire est pourtant incontournable pour exercer ce métier avec le sérieux et l efficacité qui le cartactérisent.

Vos agissements constituent de graves manquements quant à vos obligations professionnelles et contractuelles .

Par requête reçue le 14 décembre 2017, le salarié a saisi le Conseil de Prud’hommes de Calais afin d’obtenir la requalification de son contrat de travail, un rappel de salaire, de faire constater l’illégitimité et l’irrégularité de son licenciement et d’obtenir le versement d’indemnités de rupture et de dommages et intérêts.

Par jugement en date du 3 juin 2019 le Conseil de Prud’hommes a requalifié le contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée à effet au 21 octobre 2015, condamné la société à lui verser :

—  1565,68 euros à titre d’indemnité de requalification

—  1416, 56 euros à titre de rappel de rappel de salaire

—  141,65 euros au titre des congés payés y afférents

—  1568,44 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis

—  156,84 euros au titre des congés payés y afférents

—  338,78 euros au titre de l’indemnité de licenciement

—  5500 euros à titre d’indemnité pour licenciement abusif

—  500 euros à titre d’indemnité pour non respect de la procédure de licenciement

—  200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

ainsi qu’aux dépens.

Le 17 juin 2019, la société EAMUS CORK SOLUTIONS a interjeté appel de ce jugement.

Par ordonnance en date du 24 mars 2021, la procédure a été clôturée et l’audience des plaidoiries a été fixée au 7 avril 2021.

Selon ses conclusions récapitulatives reçues au greffe de la cour le 30 juillet 2019, la société EAMUS CORK SOLUTIONS appelante sollicite de la cour l’infirmation du jugement entrepris et la condamnation de l’intimé à lui verser 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L appelante expose qu’elle n a employé l intimé qu à compter du 1er février 2016, qu elle a dû faire

face à une augmentation soudaine et importante de ses besoins en personnel de sécurité entre les mois de février et août 2016 sur le site d’Eurotunnel en raison des demandes des services de l’immigration britanniques, que l’intimé était employé au niveau II échelon 2 de la convention collective, que les fonctions de ce dernier correspondaient à la définition du coefficient 120 auquel il était classé, qu’il n’effectuait aucun contrôle des entrées sur le site, que la procédure de licenciement est régulière, que l’entretien préalable pouvait se dérouler dans un lieu autre que le siège social de la société ou le lieu d’exécution de la prestation de travail, que la rupture du contrat de travail est bien fondée, qu’elle a eu connaissance du comportement de l’intimé par des mails anonymes le 28 novembre 2016, qu’il a réalisé sur son lieu de travail des selfies de ses collègues, qu il est repris en train de feindre de dormir avec trois de ses collègues dans des fauteuils à l’arrivée d’un camion se présentant au contrôle, de jouer avec son balai à la façon d une majorette devant des camions, que les vidéos diffusées sur l’application Snapchat ont discrédité la société auprès des services britanniques, que l’intimé a reconnu les faits qui lui étaient reprochés, qu’il n’a pas été filmé à son insu mais s’est prêté à cette opération, qu à la date de son licenciement il ne jouissait que d une ancienneté de 10 mois.

Selon ses conclusions récapitulatives reçues au greffe de la cour le 31 juillet 2019, Z A sollicite de la Cour la réformation du jugement entrepris, la requalification du contrat à compter du 1er février 2016, la condamnation de la société à lui verser :

—  1209,77 euros à titre de rappel de rappel de salaire

—  120,98 euros au titre des congés payés y afférents

—  1568,44 euros à titre d’indemnité pour non respect de la procédure de licenciement

—  1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

la confirmation pour le surplus.

L’intimé soutient que l’appelante n apporte pas la preuve de l’accroissement d activité dont elle se prévaut, que la sûreté du site Eurotunnel est l’une de ses missions habituelles, que la pérennité de la relation de la société avec le Home Office Britannique n’est pas contestée, que la relation de travail doit être requalifiée à compter du 1er février 2016, qu’il effectuait le contrôle des passagers et des véhicules avant l’accès en zone d’embarquement sur le site Eurotunnel au même titre que les agents de sûreté des zones aéroportuaires, qu’a minima les agents d’exploitation de sûreté relèvent du coefficient conventionnel 150, que l’entretien préalable s’est déroulé à Craywick dans des bureaux qui ne constituent même pas un établissement de l’employeur mais le siège d’une autre société, la Société EAMUS CORK SECURITY, que l’appelante l’a privé de toute possibilité de choix et d’organiser sa défense, qu’elle ne peut à la fois invoquer une faute grave et continuer de l’affecter à son poste de travail sans mesure conservatoire, qu’il ne conteste pas que certains salariés aient pu réaliser des photographies sur son lieu de travail dans la nuit du 18 novembre 2016 alors que le trafic était calme, qu’un des salariés, auteur des photographies, a détourné l’application snapchat, les a sauvegardées et ensuite transmises anonymement à la direction de la société sans le consentement des autres salariés présents, que les circonstances dans lesquelles ces événements ont été portés à la connaissance de l’employeur sont illicites, l’une des personnes ayant participé aux échanges ayant détourné leur image, que seuls l’intimé et F Y semblent avoir été licenciés.

MOTIFS DE L’ARRET

Attendu sur le rappel de salaire que, selon la grille de classification de la convention collective, les agents de sécurité qualifiés relevant de la filière de surveillance et du niveau 120 sont chargés d’une mission d’accueil et de contrôle d’accès impliquant le contrôle des entrées et sorties de personnes, véhicules, colis, l’accueil des visiteurs, l’enregistrement des identités, l’information, l’orientation et

l’accompagnement des visiteurs sur le site, la gestion des clefs et des moyens d’ouverture, d’une mission de surveillance générale prenant la forme de rondes de surveillance, de gestion des alarmes, et d’une mission de sécurité technique et incendie se traduisant par des rondes techniques, la vérification de la présence et de l’accessibilité du matériel de sécurité, la gestion et la surveillance des alarmes techniques et incendie, l’alerte et l’intervention en cas d’incendie ;

Attendu que l’intimé qui était classé au niveau II échelon 2 coefficient 120 de la convention collective revendique le statut d’agent d’exploitation de sûreté aéroportuaire qui bénéficie un mois après l’embauche du coefficient 150 ; que toutefois le site de la société sur lequel il travaillait ne peut être assimilé à un aéroport alors que l’annexe VIII dont il se prévaut ne contient que des dispositions particulières aux emplois de la sûreté aérienne et aéroportuaire ; qu’en outre, si l’agent d’exploitation est chargé également d’une mission de contrôle, celle-ci est plus approfondie puisqu’elle implique également le contrôle des titres de transport, des pièces d’identité et des pièces d’accès en zone réservée, la possibilité d’effectuer des visites de sûreté des cabines et des soutes ; qu’alors que l’agent de sécurité ne doit avoir suivi qu’une formation portant sur la réglementation de la profession, les risques et les moyens de prévention, le savoir-faire technique, la communication et le comportement et sur la sécurité incendie, l’agent d’exploitation doit avoir reçu des formations spécifiques d’une durée d’au moins 50 heures et pour le fret de 33 heures ; que de même, ils doivent être détenteurs d’une carte professionnelle autorisant l’exercice de cette profession particulière ; qu’enfin les seuls documents versés aux débats intéressant l’activité de l’intimé ne démontrent nullement qu’il se livrait à un contrôle similaire à celui d’un agent d’exploitation ;

Attendu sur la requalification du contrat de travail en application de l’article L1242-2 du code du travail que la relation de travail avec la société appelante n’a débuté qu’à compter du 1er février 2016 ; que le contrat à durée déterminée en date du 25 janvier 2016 conclu pour une embauche à compter du 1er février 2016 est motivé par un accroissement temporaire d’activité ; que la société appelante verse aux débats des pièces en langue anglaise que la cour est néanmoins en mesure de comprendre correspondant à un avenant du 15 septembre 2015 au contrat de prestation de service conclu avec le ministère britannique de l’Intérieur en vue de la constitution à compter du 1er septembre 2015 de deux équipes de trois agents devant se trouver en service 24 heures sur 24 ainsi qu’à un avenant du 9 octobre 2015 en vue de la fourniture de deux véhicules pour la période du 12 octobre 2015 au 31 août 2016 ; que la société communique également une facture émise le 30 novembre 2015 par la société Manpower France en paiement d’une prestation de présélection de 20 agents de sécurité ; que l’ensemble de ces éléments démontre que la société devait faire face à un accroissement de son activité à compter du mois de septembre 2015 en raison des nouvelles exigences de sécurité des autorités britanniques se concrétisant par la conclusion d’avenants au contrat de prestation de service ; qu’en revanche elle ne produit aucun élément précis concernant un éventuel accroissement d’activité ultérieur correspondant à la période d’embauche de l’intimé soit le 1er février 2016 ; qu’il convient donc de requalifier le contrat conclu le 25 janvier 2016 en contrat à durée indéterminée ;

Attendu en application de l’article L1245-1 du code du travail qu’il convient d’évaluer à la somme de 1568,44 euros l’indemnité de requalification due ;

Attendu en application de l’article L1234-1 du code du travail qu’il résulte de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige que les motifs y énoncés sont le comportement de l’intimé sur son lieu de travail durant le mois de novembre 2016 préjudiciable à l’entreprise ;

Attendu qu’il résulte des pièces versées aux débats que le 25 novembre 2016, H I, chef de site au port de Calais a transmis à J K, chef de site au sein de la société, une vidéo dont il avait été destinataire de façon anonyme reprenant des membres d’une de ses équipes, affectés dans la nuit du 19 novembre 2016 à la surveillance du passage dans le Tunnel du terminal Transmanche et ne respectant aucune des consignes de sécurité ; que dans son courriel, il l’invitait à agir rapidement du fait que cette vidéo était diffusée et qu’elle nuisait à l’image de la société ; que selon le

procès-verbal de constat dressé le 6 février 2018 par Me Rambur huissier de justice et contenant des copies d’écran de l’ordinateur de J K, l’intimé a été repris en train d’imiter les évolutions d’une majorette au moyen d’un balai qu’il faisait tournoyer devant un poids lourd en mouvement ; qu’il est aussi identifié en compagnie de ses deux collègues, avachi sur un siège placé à ce dernier endroit et faisant semblant d’être profondément endormi alors que survenait un camion ; qu’il apparaît enfin sur des selfies vidéos dont il est l’auteur, affublé d’oreilles de lapin en compagnie d’une de ses collègues identifiée comme étant Océane BOUCHEQUET ; que l’intimé ne conteste pas la matérialité de ces faits ; que le fait que le trafic ait été faible ce soir-là, comme il le prétend, ne diminue pas pour autant la gravité des faits qui lui sont imputés puisqu’il lui est reproché le comportement qu’il a adopté et non le fait d’avoir perturbé la circulation des poids lourds qu’il était chargé de contrôler ; qu’il ne peut se retrancher derrière le fait que ces vidéos auraient été détournées et qu’elles devaient être assimilées à un enregistrement illicite effectué par son employeur puisqu’il s’est prêté avec complaisance à ce tournage et savait que les images seraient diffusées via l’application Snapchat qu’il a lui-même utilisée pour la transmission de ses selfies ; qu’en se livrant à des facéties au goût particulièrement douteux, il semait le doute sur la qualité des contrôles qu’il devait effectuer au nom de son employeur alors que la plus grande rigueur était attendue de la société appelante en matière de sécurité des transports ; que son comportement ainsi que celui de ses collègues a bien été jugé inadmissible puisque les images le reproduisant ont été transmises de façon anonyme à son employeur ; que le risque d’atteinte à la crédibilité de la société et à son image est d’ailleurs souligné par le chef de site du port de Calais dans son courriel du 25 novembre 2016 à l’occasion de la transmission de la vidéo ; qu’il s’ensuit que les faits fautifs imputés à l’intimé sont caractérisés et rendaient bien impossible son maintien dans l’entreprise même pendant la durée limitée du préavis; que la société n’était nullement tenue de prononcer une mise à pied à titre conservatoire préalablement à la constatation d’une faute grave ;

Attendu sur l’irrégularité de la procédure de licenciement que l’intimé ayant été convoqué à un entretien préalable en vue d’une sanction pouvant aller jusqu’au licenciement, les dispositions de l’article L1232-2 du code du travail relatives à la convocation à cet entretien sont applicables à l’espèce ; qu’il résulte des pièces produites aux débats que les services administratifs de la société appelante se trouvaient au siège de la société EAMUS CORK SECURITY situés à Craywick, lieu également choisi pour l’organisation de l’entretien préalable ; que le choix de cette adresse était donc légitime ; que l’intimé ne l’ignorait pas puisque sa demande de congés de paternité en date du 15 décembre 2016 a été transmise à ces services à cette dernière adresse ; qu’en outre, il ne démontre nullement que la fixation de l’entretien en un tel lieu ait pu lui causer un quelconque préjudice et qu’en particulier un éventuel conseiller ait pu décliner son invitation en raison du lieu de l’entretien ; qu’il résulte de la lettre de licenciement que de sa propre initiative l’intimé a souhaité ne pas être assisté d’un conseiller ; que l’irrégularité de la procédure n’est donc pas établie ;

Attendu qu’il n’est pas inéquitable de laisser à la charge de chaque partie les frais qu’elle a dû exposer tant devant le Conseil de Prud’hommes qu’en cause d’appel et qui ne sont pas compris dans les dépens ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

INFIRME le jugement déféré,

REQUALIFIE l’avenant au contrat à durée déterminée en date du 25 janvier 2016 en contrat à durée indéterminée,

CONDAMNE la société EAMUS CORK SOLUTIONS à verser à Z A 1568,44 euros l’indemnité de requalification,

DEBOUTE Z A du surplus de sa demande,

FAIT MASSE des dépens,

DIT qu’ils seront supportés par moitié par chaque partie.

LE GREFFIER Le Conseiller faisant

fonction de Président

A. AZZOLINI P. C

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